La neige a recouvert la terre durant la nuit. Blancheur silencieuse, après ces jours de noirceurs et de violence. De quoi apaiser l’âme. Je roule sur cette route sauvage à travers la forêt, la respiration ample et je rends grâce à la vie pour ces instants de paix, qui reposent mon cœur autant que mes yeux. Demain il faudra repartir, entendre la souffrance de ceux qui furent maltraités, violentés, humiliés. Laisser couler à l’intérieur toutes les larmes sur le monde qui jaillissent à grand flots et laisser tourner dans mon esprit torturé : mais pourquoi ? Pourquoi tant de haine ? Pourquoi ne sommes-nous pas capables d’un peu plus de conciliance ? Pourquoi l’autre dans sa différence fait-il si peur que notre intolérance en devient meurtrière ? Immense responsabilité que la nôtre d’aller voir notre propre intolérance, tous ces rejets que nous éprouvons face à celui qui offre une parole qui nous dérange parce que simplement elle n’est pas la nôtre ou ne lui ressemble pas suffisamment.

Je vais aller aux collégiales, drôle de hasard, dans cette ville qui à ce jour fait la une des infos…

Et j’ai peur…pas de la violence de la rue, pas de la violence de terroristes possibles. Contre ceux-ci  je me sens bien impuissantes et  puis cesser de vivre par crainte d’un danger serait mourir avant l’heure.

Et pourtant j’ai peur…de la violence de nos assemblées, de la violence de la non écoute, nous qui sommes soi-disant spécialistes de l’écoute, de l’impossibilité de négocier ensemble, nous qui défendons le « faire ensemble », de la difficulté à accepter la parole de l’autre sans tout perdre de la sienne, de perdre un peu de soi pour gagner de l’autre…j’ai peur de ces petits gestes, ces sourires en coin, ces haussements légers d’épaules ou de sourcils qui génèrent le mépris plutôt que l’accueil, le rejet plutôt que la curiosité…En fait j’ai peur que nous, spécialistes de la relation nous ayons encore tant à apprendre que je pourrais me sentir illégitime à faire ce métier…

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